lundi 19 octobre 2015

Swara Yoga : méditation pour ne pas craquer


ਰਵਿ ਸਸਿ ਲਉਕੇ ਇਹੁ ਤਨੁ ਕਿੰਗੁਰੀ ਵਾਜੈ ਸਬਦੁ ਨਿਰਾਰੀ ੭॥
rav sas laoke eho tan kingurī vājē sabad nirārī.
Le canal solaire et le canal lunaire sont les cordes, 
et le corps est l’instrument : le Verbe y vibre harmonieusement.

                                        Gurū Nānak (16e siècle)
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La science du contrôle du flux d’air à travers les narines est appelée Swara Yoga. Swara désigne l'euphonie intérieure : l'harmonie vibratoire du mental induite par une respiration consciente, semblable à une harmonie musicale. Les nādi (ou méridiens) ida et pingala sont comparables aux cordes d'un instrument de musique. Lorsqu'ils sont activés et contrôlés par une respiration consciente, alors c'est tout notre système glandulaire qui vibre harmonieusement (sous le commandement de la glande pituitaire qui correspond au 6e chakra, précisément là où ida et pingala se rejoignent). Et dans cette expérience intérieure l'on peut faire l'expérience du soi véritable, telle une voix qui, sur cette mélodie, chante « je suis ».

Voici une très belle respiration méditative pour transformer son état mental et émotionnel en pratiquant Swara Yoga. Elle fut enseignée par Yogi Bhajan le 7 juin 1976.


Asseyez-vous en posture confortable, jambes croisées (ou sur une chaise), la colonne vertébrale droite. Rentrez légèrement le menton pour aligner la nuque. Croisez vos doigts (en Mudra de Vénus), les doigts de la main droite sur les doigts de la main gauche. Placez vos mains contre le corps, au niveau du diaphragme. 

Les yeux fermés, concentrez votre regard sur le bout du nez. Prenez conscience de la narine par laquelle vous respirez le plus : en quelques minutes à peine, vous devriez le savoir. Puis consciemment, changez de narine: par exemple, si vous respirez plutôt par la narine gauche, attirez le flux d’air par la narine droite, par la seule application de votre attention. Maintenez les épaules complètement détendues : vous devriez sentir une légère pression dans vos mains, mais pas au niveau des épaules.

Continuez ainsi à changer de narine toutes les quelques minutes. Méditez ainsi sur votre respiration pendant 11 minutes. Si vous le souhaitez, augmentez le temps de pratique d'une minute par jour, jusqu'à un maximum de 31 minutes.

Commentaires

La pratique de cette méditation vous donne donc accès au contrôle de vos réactions émotionnelles et de vos états mentaux, et vous empêche de craquer lorsque vous êtes sous pression. 

Lorsque votre mental est envahi de pensées négatives (angoisse, pessimisme, autodénigrement, ressentiment, colère, victimisation), ou lorsque vous voulez simplement vous sentir mieux, la pratique de cette méditation peut transformer votre expérience du moment. Cette respiration méditative modifie simplement votre état mental en changeant de narine active. Les narines sont connectées au « canal » psychique et émotionnel qu’emprunte notre énergie : apprenez à changer de canal. Lorsque vous souhaitez sortir d’un état d’accablement, de mélancolie ou de déprime, amenez votre respiration vers la narine droite pour stimuler pingala, le canal solaire, positif et extériorisant. Lorsque vous voulez calmer vos pensées, être moins réactif (sortir de la colère par exemple), attirez le flux respiratoire vers la narine gauche pour activer ida, le canal lunaire, relaxant et intériorisant

Mes conseils personnels

  • Vous pouvez aussi vous entrainer à changer de narine simplement en orientant légèrement votre regard vers la narine où vous souhaitez attirer le flux de prāna.
  • Méditez sur le mantra sat nām tout en respirant : écoutez intérieurement la syllabe sat (« vérité, réalité, essence ») sur l’inspiration, et nām (« identité » : ce à quoi la conscience s’identifie) sur l’expiration. Cela vous aidera à rester concentré, et votre méditation affectera des régions plus profondes de votre psyché.
  • Essayez de concentrer votre regard sans toutefois contracter ni les paupières, ni le front. Le visage détendu, les paupières presque entièrement closes, « posez » votre regard sur le bout du nez, tout simplement. Lorsque vous perdez ce point focal, retournez-y calmement.
  • Utilisez le mouvement de l'abdomen pour respirer plus profondément.

mercredi 14 octobre 2015

Tapa, la chaleur de la Transformation

« Tapa signifie « chaleur » : c’est la chaleur divine qui consume entièrement le karma. » Yogi Bhajan
Lorsque j’étais petit, à Lomé (Togo), j’aimais bien accompagner ma mère à son cours de Kundalini Yoga. J’étais toujours très impressionné par l’ambiance : une pièce surchauffée - (du Hot Yoga avant l’heure !), pleine de jeunes gens assidus se soumettant aux pratiques les plus engagées, le visage crispé par l’effort et la concentration, transpirant à grosses gouttes. Les étudiants avaient lu le manuel Self Knowledge (traduit en français sous le titre « Humanologie ») : certains croquaient des gousses d’ail crues pour stimuler l’énergie avant de longues séances de Sat Kriya. Tout cela contrastait fortement avec le calme qui régnait pendant la relaxation, et avec la profondeur de la méditation qui suivait.

Plus tard, j’ai retrouvé cette impression très particulière pendant le Yoga Festival, avec ces longues après-midi de Tantra Blanc dans la chaleur estivale de la Touraine, où l’on guette le moindre coup de vent comme la divine récompense de ses efforts. Et puis il y eu ce séjour à Vrindavan, en Inde. Visitant un temple dédié à Krishna, je fus frappé par ces fidèles, de jeunes hommes occidentaux pour la plupart, qui chantaient leur dévotion à pleins poumons, avec cymbales et percussions, assis pendant des heures sur des dalles de marbre, sous un soleil écrasant et dans une chaleur absolument effroyable. Il me sembla que la chaleur faisait encore une fois partie du processus. J’appris plus tard que c’est précisément ce que l’on appelle tapa : la chaleur nécessaire à toute transformation.

Qu’est-ce que tapa ?

En sanskrit, tapa signifie littéralement « chaleur » (via le latin tepidus, ce mot partage la même racine indo-européenne que le mot « tiède »). On trouve aussi tap (dans le Gurū Granth Sahib) et tapas (notamment dans les Yoga Sutra de Patanjali), qui signifient la même chose.

L’un des premiers sens du mot tapa désigne la chaleur de la gestation, de l’incubation et de la couvaison. C’est aussi bien la chaleur du ventre de la mère que celle de l’oiseau qui couve ses œufs ; c’est la chaleur du printemps qui permet aux graines de germer, celle de la chrysalide dans son cocon, et celle dont ont besoin levures et bactéries pour se multiplier (pour faire du yaourt, par exemple). Tapa peut aussi prendre le sens de « fièvre » : c’est l’élévation de la température corporelle que notre organisme produit pour stimuler la production des globules blancs et activer les défenses immunitaires. En somme, c’est la chaleur nécessaire à tout processus de métamorphose, de transformation biologique

Cela s’applique aussi à la chimie : on parle alors « d’énergie d’activation ». En cuisine, c’est  la chaleur contrôlée qui permet de cuire les aliments. Le feu de l’alambic, qui permet la distillation de la matière brute en l’alcool le plus pur ou en l’huile essentielle la plus fine, en est une autre forme. Tapa, c’est la chaleur de la transformation alchimique qui transmute le plomb en or. Et si l’on admet que cette matière vile, ce plomb des plus grossiers, représente nos instincts, et que l’essence, ou l’or, que l’on récolte à l’issue du processus de transformation, symbolise notre conscience la plus haute, alors on parle bien ici de l’éveil de la Kundalini, le long de cette colonne de distillation qu’est sushumna ; et cet éveil ne peut se faire sans tapa.

Tapa dans la philosophie du Yoga
« Lorsque vous êtes en colère, on parle de tapa, car il y a de la chaleur dans votre colère. Alors ce que pratiquent tous ces grands Yogis, vous le pratiquez aussi ! Mais vous, vous le faites sans le savoir, alors qu’eux savent tout à fait ce qu’ils font ; c’est juste une question de conscience. » Yogi Bhajan 
Selon la philosophie du Yoga, tapa s’entend comme « chaleur psychique » plutôt que corporelle : sinon, pratiquer devant son radiateur suffirait ! C’est la chaleur à laquelle on soumet son propre mental, pour l’extraire de sa nature la plus grossière, les instincts, et l’élever vers ses plus hautes aspirations : l’intelligence universelle. 

Ce feu existe en nous. De même que le fumier qui fermente s’élève en température, nos déchets subconscients qui s’amoncèlent produisent une chaleur qui nous consume à petit feu. « Quelque chose est en train de cuire », disait Yogi Bhajan à un élève dont il sentait la colère et le ressentiment s’accumuler. Là sans doute sont les fameuses poudres auxquelles une étincelle suffit à mettre le feu. Alors quitte à ce que cette chaleur se manifeste, autant qu’elle soit sous notre contrôle, comme le cuisinier garde un œil vigilant sur la flamme de son fourneau. « Cuire cela plutôt que cela nous cuise », pourrait-on dire. Ainsi, la juste application de tapa permet de générer un feu intérieur purificateur qui consume les toxines, élimine les impuretés, en somme, qui « brûle » la négativité et le karma.

Ainsi tapa peut prendre le sens général « d’ardeur spirituelle ». Cette ardeur se manifeste dans l’intensité de la pratique : c’est toute la ferveur spirituelle que l’on y met. C’est l’engagement, la résolution, mais aussi l’enthousiasme que l’on entend appliquer à un chemin qui vise à consumer l’égo. Tapa désigne donc l’effort intense de sa pratique spirituelle, mais aussi les conséquences psychiques de cet effort, la transformation personnelle qui en résulte. C’est pourquoi on peut aussi traduire tapa par « discipline spirituelle » ou encore « ascèse ». Dans l’Ashtang Yoga (les « huits membres du Yoga »), Pantanjali fait de tapa le troisième des niyama, les cinq « observances essentielles ». C’est une des clés du progrès spirituel, et nombreuses sont les mythologies qui décrivent combien les dieux eux-mêmes sont impressionnés par le tapa dont peuvent faire preuve les sages, les saintes et les héros.

Tapa et Kundalini Yoga
« Effectuez ce nettoyage total par un formidable effort du soi. Créez ce feu qui s’appelle tapa ; ce feu est le pouvoir qui peut éveiller votre Kundalini et consumer les blocages et tous schémas de votre cerveau. » Yogi Bhajan (à propos de Sodarshan Chakra Kriya)
L’efficacité du Kundalini Yoga repose, entre autres, sur une juste application de tapa. Cette « chaleur psychique », selon les mots de Yogi Bhajan, est à la base de l’éveil de la Kundalini : elle résulte de la combinaison, au niveau du centre ombilical, de prāna vāyu et d’apāna vāyu ; puis ce tapa descend au niveau du premier chakra et éveille la Kundalini qui s’y trouve lovée. 

On trouve donc tapa dans toutes les pratiques toniques et engagées dont le Kundalini Yoga a le secret, au point que de nombreux débutants, mais aussi nombre de pratiquants confirmés résument le Kundalini Yoga à cette seule intensité.

Or il ne faut pas confondre tapa et l’éveil de la conscience : si tapa est un moyen, la conscience est le but. C’est limiter le Kundalini Yoga, c’est restreindre la noblesse de ses objectifs et la richesse de ses moyens, que de l’associer systématiquement aux manifestations extérieures de tapa : plus vite, plus fort, plus longtemps, plus loin… mais pas vraiment plus haut ni plus vaste. L’égo, tel une baudruche, a vite fait de se gonfler à cette chaleur-là.

Alors si le but n’est pas tapa lui-même, mais la transformation qu’il permet, tapa doit s’accompagner d’une intention. La pratique seule, même avec beaucoup de tapa, ne suffit pas ; elle peut même se révéler néfaste en stimulant l’égo. Yogi Bhajan a toujours précisé l’intention qui sous-tend chaque kriya et chaque méditation, en général dans une longue introduction, ou encore dans le nom même de cette pratique. C’est donc dans les limites de la conscience de cette intention, et avec la plus grande précision, que tapa s’applique ; tapa ne saurait devenir un but en soi, sans quoi l’égo-mental s’en empare pour son propre compte, faute d’intention qui le transcende. Ce tapa-là peut certes impressionner les dieux, mais en aucun cas les tromper pour de bon…

Pratiquer tapa

Toute pratique tonique et engagée génère tapa, c'est-à-dire que l’ardeur de notre kriya est communiquée, via le système nerveux, au mental. C’est dans cette chaleur que la transformation du mental s’effectue, que les éléments de la personnalité sont raffinés, que les fausses identifications sont dissoutes, et que la graine de l’identité vraie, sat nām, commence à germer dans le terreau de notre conscience.

Si notre pratique est trop pauvre en tapa (irrégulière, peu intense, en somme, en deçà de l’intensité que l’on pourrait honnêtement lui donner), alors rien ou presque n’est vraiment  stimulé. Cette chaleur se dissipe avant d’avoir pu impacter notre psychisme. C’est juste un bon moment de temps en temps, mais rien de réellement transformateur.

Trop de tapa, en revanche, a pour effet de choquer le système nerveux, voire de le consumer, comme le ferait un courant électrique trop puissant traversant un circuit qui n’est pas calibré pour cela. Cela peut affecter durablement les structures psychiques et déstabiliser la personnalité. Le système nerveux a besoin de se calibrer progressivement. En outre, trop de tapa peut venir compenser un manque d’intention…

Enfin ce que l’on pourrait appeler un mauvais type de tapa - un kriya inapproprié, une méditation qui ne correspond pas à nos besoins - produit trop peu de résultat, car il n’impacte pas notre mental là où il le faudrait. De sorte que l’on se décourage (et l’on ne génère pas assez de tapa), ou alors on « augmente les doses » (et l’on génère trop de tapa). En général, cela vient d’un manque de clarté dans ses intentions, ou d’une guidance inappropriée.

Quelques pratiques pour faire l’expérience de tapa


Lorsque l’on parle de chaleur, on pense naturellement à la respiration du feu. C’est en effet un très bonne pratique pour stimuler tapa, seule ou associée à des postures toniques telles que l’éradicateur de l’égo ou la stretch pose. Les nabhi kriya vont également générer cette chaleur psychique ; cela a du sens dans la mesure où le centre du nombril correspond au troisième chakra et à l’élément Feu. Mais, on l’a dit, tout kriya ou méditation particulièrement intensive nous fera faire l’expérience de tapa : notre attitude compte aussi.

Mentionnons aussi les méditations intenses qui sollicitent les bras et qui font transpirer, telles la « méditation pour guérir les corps physique, mental et spirituel », la « méditation pour conquérir la douleur », celle pour « se débarrasser de la peur et de personnalités fragmentées ». Je pense aussi au Bowing Jāp Sāhib, et évidemment à Tap Yog Karam Kriya (on notera l’expression karam kriya, « processus de transformation du karma [en dharma] »). Quant à Sodarshan Chakra Kriya, elle est explicitement mentionnée comme stimulant tapa pour brûler le karma.

Enfin, l’un des plus sûrs moyens de générer tapa, c’est japa, la répétition d’un mantra. Yogi Bhajan en précise ainsi la séquence : « Japa génère tapa ; tapa brûle le karma, et le karma, une fois consumé, crée le dharma. Et dans ce dharma règnent la bonté et la compassion en lesquelles Dieu demeure. » Ainsi, nombre de méditations particulièrement intenses ont recours au japa d’un mantra que l’on répète de façon monocorde et auto-hypnotique. 

Je repense à la chaleur étouffante du centre de Kundalini Yoga de Lomé, aux dévots de Krishna brûlant leur karma au soleil de l’Inde, et aux longues heures passées à chanter Hammī Ham Brahm Ham en transpirant sous la big top. Et je me dis qu’en fin de compte il ne s’agissait pas de la chaleur des tropiques ni de celle du Yoga Festival, mais bien de celle, plus humble mais bien plus formidable, qu’un être humain peut produire de lui-même au service de sa transformation et de son élévation :
« Allumez le feu de la droiture, irradiez de la lumière du Nām et de la vérité, et saisissez dans votre cœur la formidable chaleur du soleil » Yogi Bhajan
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Initialement paru dans Sat Nam Infos,
actualité en ligne de la Fédération Française de Kundalini Yoga

vendredi 9 octobre 2015

Méditation pour réduire le stress

« Respirer en huit temps, observer et compter ainsi ses respirations, vous oblige à vous relier à votre souffle. La meilleure façon de procéder consiste à pratiquer cet exercice chaque soir. Onze minutes quotidiennes de cette respiration en huit temps peut vous donner assez d’énergie pour équilibrer votre consommation quotidienne de force de vie, et suffit à éliminer le stress. Alors, est-ce possible ? Avez-vous onze minutes ? » Yogi Bhajan, 8 août 1994
Voici une respiration méditative (ou prānayāma) particulièrement efficace pour réduire le stress et évacuer les tensions intérieures. Lorsqu'elle est pratiquée le soir, elle élimine le stress accumulé par le corps et dans l’aura (le champ magnétique). Elle développe le calme, la sérénité et l'équilibre intérieur, et nous recharge en énergie vitale (ou prāna).

Pour pratiquer cette méditation: assis-e en posture confortable, le dos droit, le menton légèrement rentré pour aligner la nuque. Dégagez la poitrine, et posez les mains sur les genoux en gian mudra (les extrémités des pouces et des index sont connectées), ou dans le mudra méditatif de votre choix. Fermez le yeux.

Inspirez par le nez en huit temps (ou huit paliers), et expirez par le nez en une fois. La respiration est puissante et profonde. Continuez à respirer ainsi pendant 11 minutes.

Pour terminer, inspirez et gardez le souffle pendant 5 à 10 secondes, puis expirez. Inspirez à nouveau, gardez le souffle et roulez les épaules pendant 15 à 20 secondes, puis expirez. Inspirez une dernière fois, gardez le souffle et roulez les épaules le plus vite possible pendant 15 à 20 secondes, puis expirez, et détendez-vous.

Mes conseils personnels:

  • Même si ce n'est pas précisé ici, il peut être utile de concentrer son regard sur un point particulier; concentrez sans toutefois contracter. Les paupières closes, vous pouvez par exemple poser votre regard sur le bout du nez, ce qui va donner un point fixe à votre mental et favoriser votre concentration.
  • Pour compter les huit temps de l'inspiration, vous pouvez utiliser un ashtang mantra, un mantra en huit syllabes ou huit mots. Par exemple: Ra Ma Dha Sa Sa Se So Hang.
  • Utilisez le mouvement de l'abdomen pour respirer plus profondément.

samedi 3 octobre 2015

Niyama (dans les Yoga Sūtra)

Selon les Yoga Sūtra, recueil d’aphorismes du rishi Patañjali, on recense huit « membres » (asht-anga), huit étapes fondamentales sur le chemin du Yoga : yama, niyama, āsana, prānāyāma, pratyāhāra, dhāranā, dhyāna et samādhi. Après yama, voici quelques mots sur niyama.




Niyama

Niyam signifie, entre autres « méthode, processus, discipline ». Les Yoga Sutrā de Patanjali recensent cinq niyama :

  • saucha : l’hygiène, la propreté, la pureté physique et mentale;
  • santosha : le contentement, parfois aussi traduit par « patience »; 
  • tapas : l’effort, l’ardeur spirituelle, l’ascèse; 
  • svādhyāya : littéralement « méditer sur soi »; la connaissance de soi, la conscience de soi;
  • īshvara-pranidhāna : littéralement « se consacrer au Seigneur »; la dévotion; demeurer en Dieu, en être un disciple, tout ramener au Divin.

Comme on l’a vu précédemment, les cinq yama sont les prérequis moraux qui dégagent notre intention initiale de tout fantasme, de tout espoir, de toute intention parasite de l’égo. Les yama régulent les mouvements psychiques des « cinq passions », afin qu’elles ne s’intègre pas à notre cheminement.

Les cinq niyama, quant à eux, proposent une discipline pour faire en sorte que notre intention demeure pure de toute corruption égotique tout au long du chemin. Et pour s’en assurer, il faut s’y appliquer chaque jour. De même que le corps se salit chaque jour, on le lave chaque jour ; il en va de même pour le mental subconscient. La discipline suggérée par niyama est donc quotidienne.

Ainsi, saucha nous purifie pour faire en sorte que notre désir, kām, transcende ses manifestations instinctives et deviennent un désir pur et puissant de s’unir au Divin, de se sentir appartenir à la Conscience Universelle (« longing to belong » selon l’expression de Yogi Bhajan).

Santosha, « se contenter de ce que l’on a et de ce qui est », laisse la voie à la juste compréhension plutôt qu’à des projections et des interprétations de la réalité qui concluent à la victimisation, à la honte, au ressentiment, à la culpabilité (liste non exhaustive…) qui sont autant de visages de la colère contre soi ou le monde (krodh).

Tapa (cliquez ici pour un article plus détaillé) est la chaleur psychique, l’effort sur soi-même (y compris l’effort physique) qui permet d’éveiller la conscience de soi son état hypnotique ordinaire, mais un effort toujours orienté vers le but le plus noble, l’éveil de la conscience individuelle vers la Conscience Universelle. C’est la chaleur puissante mais contrôlée qui meut la conscience en un mouvement ascendant, tel un ballon d’air chaud qui monte. Le combustible nécessaire à cette chaleur est notre propre karma, nos identifications erronées et nos fausses limitations. Tapa s'oppose donc à lobh, l’avidité qui, au contraire, a besoin de puiser toujours plus dans le monde horizontal (les biens matériels, les relations sociales) pour entretenir le feu de l’égo et ses fascinantes projections.
« Tapa signifie "chaleur": c’est la chaleur divine qui consume entièrement le karma. » Yogi Bhajan
Svādhyāya signifie « conscience de soi ». Cultiver la conscience de soi, c’est l’exact opposé de moh (l’orgueil) : la glorification du moi, identité secondaire, illusoire et éphémère (là où le soi demeure sereinement dans l’éternité de chaque instant).

Enfin, īshvara-pranidhāna, c’est se référer à Dieu, s’en remettre entièrement à la Conscience Universelle. Si je dois cultiver quelque attachement, autant me lier au Divin plutôt que d’être entravé par tout autre attachement, toute autre identification (ahangkar). Ici il est question du sacrifice, qui est la transformation de nos attachements. Ahangkar marque le refus d’en faire l’oblation, tandis qu’īshvara-pranidhāna est l’expérience d’un sacrifice total, inconditionnel, réitéré jusqu’à ce qu’il demeure un état permanent.

On peut faire un parallèle intéressant entre les niyama et la sādhanā telle qu’elle est pratiquée quotidiennement dans la tradition du Kundalini Yoga :

  • saucha se manifeste par la douche froide, ishnān, qui détoxifie le corps et nettoie le subconscient de son activité nocturne ;
  • le Japjī Sāhib de Gurū Nānak décrit la réalité intrinsèque de l’Univers ; il dit ce qui est. Sa lecture installe santosha ; le sens des mots ainsi que leur vibration mettent calmement notre mental en relation avec l’intelligence universelle, afin qu’il développe la compréhension la plus juste et la mieux informée ;
  • tapa est une composante essentielle de tout kriya (ou série d’exercices) de Kundalini Yoga ; chaque kriya est véritablement « un formidable effort du soi » (Yogi Bhajan) ;
  • la méditation amène évidemment svādhyāya, et la nature dévotionnelle des chants, īshvara-pranidhāna qui se poursuit dans le chant du kirtan, la présence de la communauté (sangat) et la lecture du hukam qui suivent la sādhanā

Après yama et niyama vient āsana, la posture (prochain article).

vendredi 2 octobre 2015

Yama (dans les Yoga Sūtra)

Selon les Yoga Sūtra, recueil d’aphorismes du rishi Patañjali, on recense huit « membres » (asht-anga), huit étapes fondamentales sur le chemin du Yoga : yama, niyama, āsana, prānāyāma, pratyāhāra, dhāranā, dhyāna et samādhi. Voici quelques mots sur yama.





Yama

Yam signifie « contenir, maintenir, retenir », (tandis que a-yam renvoie au déploiement, comme dans prānāyām : « déploiement du prāna, expansion de l’énergie vitale »). Patanjali enseigne qu’il y a cinq yamas :

  • ahimsā : la non-violence ;
  • satya : la vérité, l'essence ;
  • asteya : ne pas voler ;
  • brahmacharya : littéralement « aller avec Brahma (Dieu) » ; la modération, la retenue des instincts ;
  • aparigraha : la non-possessivité; demeurer libre de tout attachement.

En fait, les yamas sont les fondements de la voie yoguique. Ils constituent la base, le socle sur lequel fonder son développement spirituel. Ne pas s’y conformer revient à donner libre cours aux cinq passions que sont la luxure (kāma), la colère (krodh), l’avidité (lobh), l’orgueil (moh) et l’attachement égotique (ahangkar). Traditionnellement, les cinq yamas n’étaient même pas enseignés dans les ashrams, car on considérait que quiconque n’a pas installé cela dans sa vie n’a pas les prérequis pour commencer le chemin de l’éclosion de l’âme. 

À l’inverse, l’observance des cinq yamas appelle naturellement à marcher sur le reste du chemin. Les bases de l’épanouissement de l’âme doivent être saines : l’âme est comme une graine qui va germer, se développer, fleurir, et donner des fruits. Et l’on ne veut pas que la graine d’une mauvaise herbe toxique pousse également, profitant de l’élan de l’âme.

Donc le disciple doit être bien certain, dès le départ et tout au long du chemin, qu’il n’y a pas d’intentions cachées derrière son engagement spirituel ; qu’il n’y pas dans son subconscient la volonté secrète d’assouvir ses désirs, de se venger du passé, d’amasser des richesses, ou d’affirmer son égo. Les cinq yamas affirment clairement que le chemin que l’on entreprend ne comblera aucune de ces passions ; ils nous dégagent de tout espoir de les assouvir et font en sorte qu’elles ne nous accompagnent pas. Les yamas nous aident à sacrifier nos intentions secondaires et à transformer les cinq passions pour raffiner notre intention première, celle de notre âme.

L'on peut ensuite passer aux niyama.

jeudi 1 octobre 2015

Méditation pour soulager le stress

Méditation pour soulager le stress
et nettoyer les émotions du passé

Cette méditation (extraite du manuel Physical Wisdom édité par Kundalini Research Institute) est particulièrement efficace pour faire face aux situations stressantes liées à nos relations et à notre passé familial.
Assis en posture confortable, les jambes croisées, le dos droit, le menton légèrement rentré pour aligner la nuque. Amenez les mains face à la poitrine et joignez les bouts des doigts de la main droite à ceux de la main gauche. Les doigts pointent vers le haut, et on maintient un peu d’espace entre les paumes. 

Dans cette posture, concentrez votre regard sur le bout du nez et respirez 4 fois par minute selon la séquence respiratoire (ou prānayāma) suivante :

  • inspirez pendant 5 secondes ;
  • suspendez le souffle pendant 5 secondes ;
  • expirez pendant 5 secondes.

Continuez ainsi pendant 11 minutes, ou jusqu’à ce que vous vous sentiez soulagé du stress.

Pout terminer, inspirez profondément, suspendez le souffle quelques secondes, puis expirez et détendez la posture.


Tap Yog Karam Kriya

Méditation enseignée par Yogi Bhajan le 11 octobre 1976

« Il n’y pas besoin de beaucoup de postures du Poirier, la tête en bas, les jambes en l’air, de s’entrainer pendant 25 ans avant d’y parvenir, etc. Non ! Non, pas besoin de cela. Le bon mot au bon moment suffit : précisément quand le corps, le mental et l’âme appartiennent à l’Infini. C’est pourquoi on appelle ce très précieux kriya Tap Yog Karam Kriya. Tapa désigne l’essence de l’esprit du Soi, le feu de l’esprit. Il a l’air un peu difficile, mais si vous le pratiquez dans la bonne direction, si vous le faites de la bonne façon pendant le temps adéquat, vous serez surpris. Il renforcera votre volonté d’une telle façon, il vous donnera une telle compréhension de votre personnalité, que vous aimerez vraiment pratiquer japa de cette façon. » Yogi Bhajan 

Comment pratiquer cette méditation ?
Assis en posture confortable, les jambes croisées et le dos droit, rentrez légèrement le menton pour allonger la nuque.

Dans cette posture, tendez les bras devant vous ; maintenez-les parallèles au sol. Joignez les poignets, et ouvrez largement les mains, les paumes vers l’avant, les doigts pointant vers les côtés. Les yeux presque fermés, concentrez votre regard sur le bout du nez, mais sans contraction. Commencez à chanter rythmiquement, de façon monotone, sur une expiration, sans reprendre votre souffle, le mantra suivant :

Sortez avec vos parapluies !

Un grand père et son petit fils récitent l'Ardas, la prière sikhe.

Un saint homme marchait sur les routes du Pendjab, allant de villes en villages, offrant son enseignement à qui voulait l'entendre.

Un jour, il arriva aux abords d'une bourgade, dont il vit les habitants réunis en grande procession. Avec ferveur, ils entonnaient des chants de louange, et semblaient vraiment prier pour quelque chose de précis. Le sage demanda à l'un d'eux : « Pourquoi cette procession ? Que demandez-vous donc à Dieu avec tant de dévotion ? » « Babaji, répondit l'habitant (car c'est ainsi qu'on s'adresse aux sages), nous prions pour que Dieu fasse tomber la pluie. Il n'a pas plu depuis des semaines, et nos récoltes sont menacées. C'est pourquoi nous chantons la louange divine, afin que Dieu voit notre dévotion et nous accorde la pluie. »

Le saint homme répondit alors: « Votre dévotion est touchante, en effet. Mais si vous avez vraiment confiance en Dieu, sortez avec vos parapluies ! »

Rien n'existe...

Assis à l'ombre d'un arbre, le maître fumait, contemplant son jardin. Alors qu'il tirait sur une longue pipe en bambou, un de ses jeunes disciples s'approcha et lui dit : « Je crois que j'ai compris, maître: tout n'est qu'illusion ! Le vide est la vraie nature du monde phénoménal ! Rien n'existe, ni ceci, ni cela. Ni mon mental, ni vous, ni même Bouddha. Et il n'y a rien à chercher ni à atteindre ! Il n'y a ni sagesse, ni médiocrité, ni lumière ni obscurité, ni réalisation, ni déception. Il n'y ni donner ni recevoir. Rien n'existe ! »

Il attendait, souriant, que le maître valide une telle réalisation. Celui-ci médita quelques secondes, puis donna soudain un grand coup de pipe sur la tête du disciple.

Celui-ci se frotta le crâne de douleur, et rougit de colère. Le maître dit alors : « Si rien n'existe, d'où vient cette colère ? »

Le mental-singe illustré


« Si vous ne faites pas confiance en la Vérité, comment pourrez-vous vivre la Vérité ? Vous n'êtes qu'un singe, un vrai babouin ! D'ailleurs, c’est bien pour cela que Dieu a créé autant de singes: pour qu’on ait toujours sous les yeux notre condition de base ! » Yogi Bhajan

Connaissez-vous Kabir? C'est un des plus grands mystiques de l’Inde ; il vécut au 15e siècle, quelques temps avant Gurū Nānak. Simple tisserand, il chantait et enseignait depuis son atelier, à Bénarès. Sa sagesse y attirait des foules considérables, au grand dam des mollahs musulmans et des brahmanes hindous qui considéraient ses hymnes comme de véritables blasphèmes. Plusieurs fois condamné à mort, il s’en échappa à chaque fois : même Mata Ganga, la « Mère Gange », dans lequel il fut jeté enchaîné, refusa de le noyer !

La tradition sikhe donne une grande place à Kabir, et ses chants figurent par centaines dans le Sirī Gurū Granth Sāhib, parfois suivis de commentaires de Gurū Nānak ou Gurū Arjan.

À propos du mental, voici un des images que donne Kabir (SGGS p. 336) : un singe curieux et avide.

ਮਰਕਟ ਮੁਸਟੀ ਅਨਾਜ ਕੀ ਮਨ ਬਉਰਾ ਰੇ ਲੀਨੀ ਹਾਥੁ ਪਸਾਰਿ ॥
markat mustī anāj kī man baorā re līnī hāth pasār.
Le singe glisse sa main, ô mental insensé, et saisit une pleine poignée (de graines).

ਛੂਟਨ ਕੋ ਸਹਸਾ ਪਰਿਆ ਮਨ ਬਉਰਾ ਰੇ ਨਾਚਿਓ ਘਰ ਘਰ ਬਾਰਿ ॥੨॥
chhūtan ko sehsā pariā man baorā re nāchio ghar ghar bār.
Incapable d’échapper à sa curiosité angoissée, ô mental insensé, on le fait bientôt danser de porte en porte, encore et encore.

Cela fait en fait référence à une ruse traditionnelle qu’utilisaient certains peuples d’Afrique et d’Asie pour attraper les singes :


  • Faire en sorte qu’un singe vous observe. 
  • Creuser un trou dans un noix de coco fermement attachée, ou encore dans une termitière ; le trou doit être juste de la taille d’un main de singe
  • Y glisser quelques graines. 
  • Bientôt, un singe curieux y glissera la main pour attraper la nourriture. 
  • Mais sa main pleine est désormais trop grosse pour ressortir du trou, et le singe est piégé.


Aussi incroyable que cela puisse paraître, le singe n’a qu’à lâcher la nourriture pour s’échapper. Mais à cause de sa curiosité maladive (c’est le terme qu’emploie Kabir), de son avidité et de sa gourmandise… il ne le fait pas !

On parle ici du singe-mental (monkey mind en anglais). Car de même, notre mental est pris au piège par Maya, c’est-à-dire tout ce qui est local et temporaire mais auquel on s’identifie néanmoins: sensations, choses, personnes, statuts, opinions, etc. - c’est à moi, c’est le mien, mon ceci, mon cela…  (« mon préssscieux »). Et si le mental est piégé, c’est à cause de sa curiosité (« la différence entre vous et moi : moi je sais et cela m’arrête ; vous, vous savez et vous y allez quand même » Yogi Bhajan), de son avidité et de sa tendance instinctive à s’emparer des choses et de prétendre qu’elles lui appartiennent. En somme, il suffirait au mental de lâcher prise sur ce qu’il pense posséder pour s’échapper. Ou mieux encore, il lui suffirait d’apprendre à ne s’emparer de rien, et à plutôt se tourner vers la conscience supérieure. Mais si l’on n’éduque pas son mental à cela, on est comme le singe de Kabir: un fil à la patte, réduit à se comporter éternellement comme un singe de foire pour quelques récompenses.

En bonus, une formidable petite vidéo qui illustre à merveille le propos de Kabir: comment trouver de l’eau dans le désert (rassurez-vous, rien de cruel, le singe s’en sort bien à la fin).


Méditation, Silence et Son Sacré


On m'a récemment posé une question intéressante. De retour d’une retraite de méditation silencieuse, un élève était perplexe : on lui avait appris que toute pratique méditative était censée être silencieuse et immobile. « Mais dans le Kundalini Yoga, disait-il, nous méditons souvent en musique, et en mouvement. Et puis ça marche ! Alors comment peut-on méditer ainsi ? »

En effet, la méditation est question de silence et d’immobilité. Parlez de méditation autour de vous, et vous constaterez que c’est ce à quoi la plupart des gens feront allusion. Et c’est vrai, la méditation dans le Kundalini Yoga peut sembler assez différente, à maints égards, de ce que l’on perçoit d’autres pratiques méditatives. Alors en tant que Kundalini Yogis, comment approchons-nous le silence en méditation ? Avec tant de musique, où trouvons-nous le silence ?

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